Alors que 60 % des pays africains dépensent plus pour le service de la dette que pour la santé M. Muchanga a appelé à agir dans trois directions : « Nous devons assurer une croissance du continent de 10 % en moyenne, bien supérieure aux 3,5 % actuels, diversifier nos exportations en développant notre industrie manufacturière, et renforcer l’intégration régionale en allant vers un marché commun qui permettra d’harmoniser nos politiques pour une plus grande résilience aux changements climatiques et pour régler la question de la dette. »

60% des pays africains dépensent plus pour le service de la dette que pour la santé, selon la BAD

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Il est plus que nécessaire de trouver des solutions innovantes sur la gestion de la dette des pays africains, avec des actions proactives à mener pour sécuriser le financement du développement en Afrique, ont estimé mardi à Nairobi des panélistes réunis lors d’une session parallèle organisées en marge de ses Assemblées annuelles du Groupe de la Banque africaine de développement qui se tiennent du 27 au 31 mai dans la capitale kenyane.  La session consacrée au financement de la dette et du développement en Afrique était coorganisée par la Commission de l’Union africaine et le cabinet de conseil international Development Reimagined.

Albert Muchanga, commissaire au Commerce et à l’industrie de à la Commission de l’Union africaine, pour ouvrir les débats, a alerté sur le risque d’une possible « décennie perdue pour le développement en Afrique » d’ici à 2034 en raison des défis majeurs suivants : fardeau de la dette, déficit d’intégration régionale, manque de compétitivité des entreprises et de diversification des économies.

Alors que 60 % des pays africains dépensent plus pour le service de la dette que pour la santé M. Muchanga a appelé à agir dans trois directions : « Nous devons assurer une croissance du continent de 10 % en moyenne, bien supérieure aux 3,5 % actuels, diversifier nos exportations en développant notre industrie manufacturière, et renforcer l’intégration régionale en allant vers un marché commun qui permettra d’harmoniser nos politiques pour une plus grande résilience aux changements climatiques et pour régler la question de la dette. »

La question d’une réforme du Cadre commun du G20 sur la restructuration de la dette a notamment été évoquée par l’ensemble des panélistes.

Ahmed Shide a suggéré « une approche plus coordonnée, avec plus de transparence et des lignes plus claires entre les emprunteurs et les créanciers » tandis que Mme Morsy a plaidé pour « une réforme rendant le Cadre commun plus effectif, limité dans le temps et ouvert à une plus grande éligibilité des pays ».

« Pour réduire le risque, il est nécessaire de fournir des garanties de créanciers officiels, comme l’ont fait, en 2023, les institutions financières africaines qui ont aidé les pays à lever des obligations souveraines à des coûts plus faibles », a préconisé Hanan Morsy.

Pour Mavis Owusu-Gyamfi, « la dette n’est pas une mauvaise chose. Tout dépend de ce que vous en faites. En investissant dans le développement, dans la diversification de nos économies, dans la compétitivité de nos exportations, nous pouvons briser le cycle de l’endettement à long terme. Et tout commence chez nous avec le cadre juridique et institutionnel. Certains pays comme le Zimbabwe ont de très bons cadres à cet égard. »

Tous les panélistes ont reconnu l’importance du cadre juridique dans l’architecture de la dette, citant en exemple les clauses dites de « résilience climatique » qui sont un outil de soutien à la liquidité en cas de catastrophe climatique. En outre, ils ont souligné la nécessité d’assurer une bonne utilisation de la dette au niveau national, avec la mise en place de mécanismes de redevabilité à travers des organismes indépendants comme au Kenya.

Obtenir des financements abordables à l’échelle pour contribuer au développement des pays, notamment par les marchés de capitaux régionaux, renforcer la capitalisation des banques multilatérales de développement et les guichets concessionnels, optimiser les bilans, tout en renforçant les capacités internes des pays avec une analyse de soutenabilité de la dette, ont fait partie des idées émises par les panélistes.

Renforcer les capacités juridiques des pays et des gestionnaires de dette entre dans les missions de la Facilité africaine de soutien juridique (ALSF), créée en 2008 à l’initiative du Groupe de la Banque africaine de développement.

Très active dans le domaine des dettes souveraines, l’ALSF, a souligné Olivier Pognon, prodigue des conseils notamment à travers des guides thématiques, des manuels pratiques et une académie. Elle a travaillé par exemple avec la Somalie et la Guinée Bissau sur la restructuration de leur dette.

Pognon a insisté sur le pouvoir de négociation des États africains, trop longtemps négligé, et sur la nécessité d’être transparent sur la dette pour aboutir à des résultats. « Avoir recours à des conseils juridiques très tôt est ce qu’il peut arriver de mieux pour restructurer une dette et éviter les problèmes que rencontrent les pays africains. C’est le meilleur conseil que je peux donner ! », a-t-il lancé à l’auditoire.

Trois pays du continent sont en défaut de paiement sur leurs dettes extérieures – le Ghana, la Zambie et l’Éthiopie – et 21 autres sont actuellement en situation de surendettement.

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