«D’abord, je dois me réjouir de cet effort, que je dirais préliminaire. Un effort préliminaire du G20 puisque depuis le 25 mars j’ai lancé un appel depuis Dakar pour une annulation de la dette publique et pour un rééchelonnement de la dette privée de l’Afrique. Je l’avais dit parce que justement en créant mon plan de riposte j’ai constaté que le paiement des intérêts de la dette, si ce paiement avait été différé, me donnait quasiment la moitié du montant nécessaire à ce plan qui est de 2 milliards d’euros à peu près, soit 1 000 milliards de francs CFA.
Rien que le paiement des intérêts de la dette sur l’année représentait pour le Sénégal à peu près 580 milliards de francs CFA. C’est un peu moins qu’un milliard de dollars. Et nous avons considéré qu’une pandémie comme le Covid-19 appelle des réponses globales. Nous sommes dans un monde où la solidarité doit jouer.
L’Afrique a besoin de cette solidarité en ce moment. Je pense à ceux qui ont déjà réagi positivement comme le président Macron, je le félicite au passage, mais aussi comme sa sainteté, le pape François. Nous avons été réconfortés par ses propositions. Même les institutions multilatérales comme le Fonds monétaire et la Banque Mondiale, elles ont été à la pointe du combat. Et le rééchelonnement c’est une chose, on s’en réjouit, mais il faut aller au-delà.
Il faut être courageux et j’appelle mes collègues chefs d’État du G20 à aller vers de véritables réformes, car je suis convaincu qu’après le Covid il faudra un nouvel ordre mondial. Un nouvel ordre qui devra renforcer la résilience de tous les pays et de tous les États, car si demain cette maladie reste quelque part dans un village quelconque du Sénégal ou d’ailleurs, c’est toute la communauté mondiale qui est menacée. Donc la résilience dans notre système de santé mérite déjà, cette première opération va permettre de faire face à la lutte, mais il y a la résilience économique, il y a les conséquences dramatiques du Covid sur l’emploi et c’est cela qui doit amener tout le monde à agir dans ce sens.
Vous savez 365 milliards c’est certes important, mais qu’est-ce que ça représente par rapport aux milliers de milliards de dollars qui font l’objet de transaction chaque jour dans le cadre des Bourses, dans le cadre de tout ce qui, aujourd’hui, anime le monde ? Je pense que le moment est venu où l’on doit s’arrêter un peu. Quelle est la finalité de notre monde ? Est-ce que nous sommes là pour courir derrière des super gains astronomiques ? Ou devons-nous être capables, lorsque la maladie frappe, de solidarité pour l’humanité ?
Quand même 365 milliards ce n’est pas, à mon sens, quelque chose qui est insurmontable pour les pays donateurs comme ceux du G20. Je ne leur demande pas de faire ce qu’ils ne peuvent pas. Ils peuvent à mon avis, avec des mécanismes appropriés, en concertation avec l’Afrique, travailler sur des modalités qui n’handicaperont pas les pays donateurs ou les pays prêteurs mais qui permettrait à l’Afrique de faire face honorablement et dignement et d’être un membre à part entière de la communauté mondiale. C’est ma conviction et je continuerai à réclamer cela», a déclaré Macky Sall dans un entretien accordé à Rfi et France 24.