Par Pr Abou KANE
Dethié Fall a rejoint le camp de Sonko après l’avoir quitté à quelques semaines de l’élection présidentielle. On peut dire que c’est du « Dem Dikk » (va-et-vient ou aller-retour). Sa décision peut être expliquée par ce qui est connu en économie comme le paradoxe d’Easterlin selon lequel, à partir d’un certain niveau de revenu, la croissance n’accroît plus le niveau de bien-être.
Le paradoxe d’Easterlin appliqué à Dethié
Richard Easterlin est un ancien étudiant de Simon Kuznets (Prix Nobel d’économie 1971). Il est connu pour ses travaux sur l’économie du bien-être. Le paradoxe qui porte son nom a été popularisé en 1974 et stipule que si l’on atteint un certain niveau de richesse, la croissance n’influe plus sur le niveau moyen de bien-être; le bonheur supplémentaire tiré de la croissance devient très faible.
Dethié Fall a déjà été député. Il était investi à la 5e place sur une liste de l’opposition dirigée par Barthelemy Dias. Même s’il est élu député sur cette liste, il ne peut pas avoir ce qu’il n’avait pas déjà par le passé. Le siège de député est donc le gain maximal qu’il peut avoir s’il continue son compagnonnage avec l’opposition. Même si l’on peut comprendre son attitude sur le plan purement politique, le moment choisi pour changer de direction (le point d’inflexion) peut interpeller.
Le point d’inflexion stratégique
Le point d’inflexion est un concept mathématique qui matérialise le moment où une courbe change d’allure (elle était convexe et devient concave et vice-versa). C’est en quelque sorte un changement brusque de direction, une discontinuité avec le passé, pour dire que ce qui était vrai avant, ne l’est plus.
En économie et en management, on utilise aussi l’expression « point d’inflexion stratégique » qui signifie un changement d’environnement commercial résultant d’une avancée technologique ou d’un changement de réglementation qui génèrent de nouvelles opportunités.
Pour le cas de Dethié Fall, c’est la rencontre avec Sonko qui fait office de changement technologique et d’émergence de nouvelles opportunités. Il peut avoir un poste de ministre ou autre; ce qui est certain c’est que ce sera plus intéressant qu’un poste de député qui était le maximum qu’il pouvait espérer de son alliance avec l’opposition.
Dans le court terme cela peut beaucoup lui apporter mais dans le long terme ce n’est pas évident car la liste qu’il vient de quitter s’appelle « saam sa kaaddu » (tenir parole). Or, il avait déjà quitté Sonko avant l’élection présidentielle (signe « moins ») ensuite il donne sa parole à Barthelemy et compagnie avant de les quitter (signe « moins »).
La conséquence sur sa carrière politique dépendra de l’opération (multiplication ou addition) que chaque citoyen fera entre les deux signes « moins ». Si on multiplie c’est positif mais si on additionne c’est négatif.
FASEG/UCAD