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Liliane Bettencourt est morte ce jeudi 21 septembre, a annoncé sa famille. A 94 ans, c’était la femme la plus riche au monde, la 14e fortune mondiale selon le classement du magazine Forbes. Quarante fois milliardaire, sa fortune n’a cependant pas suffi à protéger totalement Liliane Bettencourt dont la fin de vie ressemble plus à un manuel de procédures juridiques qu’à un vademedum pour retraite dorée et paisible.
L’ombre de La Cagoule
Liliane Bettencourt doit sa fortune à son père de qui elle hérite, à son décès en 1957, le groupe L’Oréal. Eugène Schueller a construit son empire dans les cosmétiques grâce à l’invention des premières teintures capillaires de synthèse en 1907, puis celle de l’Ambre solaire, la crème à bronzer indissociable des premiers congés payés en 1936.
Fortune faite dès les années trente, il met ses importants moyens financiers au service de son ami Eugène Deloncle, le fondateur du groupuscule antisémite de La Cagoule, avec qui il monte durant l’occupation une formation d’extrême droite, le Comité secret d’action révolutionnaire.
Accusé de collaboration, en 1945, il est relaxé de toutes poursuites notamment grâce au témoignage de François Mitterrand : il obtient la Croix de guerre et est fait chevalier de la Légion d’honneur.
Née le 21 octobre 1922, Liliane est élevée dans un milieu aisé, mais alors qu’elle n’a que 5 ans, le malheur la frappe, elle perd sa mère, musicienne.
Son père, bourreau de travail, la confie aux religieuses Dominicaines qui se chargeront de son éducation.
En 1950, elle épouse André Bettencourt, un ami de son père, ex-cagoulard qui sera ministre à plusieurs reprises. Placé à la direction de L’Oréal, il maintient la tradition de proximité avec les sphères politiques de droite, instaurée par son beau-père. Cela ne l’empêche nullement de cultiver une amitié réciproque, jamais démentie, avec François Mitterrand.
Mais son passé trouble durant la guerre refait surface ainsi que celui de plusieurs dirigeants de L’Oréal. Qualifiant cette période de sa vie d’« erreur de jeunesse », André Bettencourt est néanmoins contraint de quitter la vice-présidence du géant de la cosmétique en 1994.
Une douloureuse énigme
Après la mort de son mari, en 2007, Liliane Bettencourt s’attachera à maintenir la tradition de « maison accueillante » aux politiques dans un esprit d’intérêt partagé.
Mais le long fleuve tranquille de la vie de la richissime veuve est bien vite agité de périlleux tourbillons. Révélations après scandales, la vieille dame est sommée de s’expliquer dans les médias.
Malentendante depuis son plus jeune âge, ce handicap s’est accentué au fil des années et le dialogue avec ses interlocuteurs n’en est pas facilité. Les fameux enregistrements du majordome dévoilent notamment des montages financiers d’une rare audace. Suite à cet étalage, Liliane Bettencourt se verra d’ailleurs infliger en 2011 un redressement fiscal de près de 78 millions d’euros.