Monsieur le Président,
Je vous adresse la présente pour deux raisons principales :
En tant que députés, nous serons amenés dans les tout prochains jours à interpeller le gouvernement, entre autres, sur sa gouvernance et la conduite de l’action publique dont il a la charge. Le principe voudrait, pour notre crédibilité, qu’on commence par faire le ménage en notre sein d’abord.
La treizième législature vient d’être installée, sous un folklore qui jure d’avec votre discours inaugural empreint d’une grande solennité.
Dans ce discours, prononcé à grand renfort de citations d’auteurs français, de rappels historiques, voire même bibliques, vous avez largement mis l’accent sur les notions de responsabilité, de conscience et de discipline des parlementaires avec, en prime, des menaces à peine voilées contre les contrevenants éventuels.
Nous voulons bien vous accorder une présomption positive, monsieur le président, mais pas sur parole simplement. Vous conviendrez avec nous que tout nouveau départ doit être assis sur des bases saines parce que assainies. C’est pourquoi, vous prenant au mot, je vous interpelle sur la situation fiscale de l’Assemblée Nationale.
L’année dernière, à pareille époque, je soulevais un cas patent de détournement fiscal impliquant l’institution, que vous présidiez. Ces infractions répétitives avaient occasionné des redressements fiscaux des services compétents qui, à la date du 23 mai 2016, s’élevaient à un montant de six milliards cinq cent quatre vingt neuf millions sept cent huit mille neuf cent soixante quatorze (6 589 708 974) francs CFA décomposé ainsi:
Nature d’impôt | Montants |
Retenues à la source | 3 909 037 163 |
TVA précomptée | 2 680 671 811 |
Total dette fiscale | 6 589 708 974 |
Or, dans votre communiqué paru dans les colonnes du quotidien “l’Observateur” du 24 mai 2014, vous affirmiez notamment que cette dette fiscale était héritée et ne s’élevait qu’à seulement 120 809 722 de francs CFA.
Il s’agit là d’une fraude fiscale caractérisée, passible de sanctions fiscales et pénales conformément aux dispositions du code général des impôts ; d’autant qu’elle porte sur des impôts retenus sur les salaires et émoluments du personnel, des députés et des prestataires, ou de la TVA précomptée à vos fournisseurs, dont le reversement n’a pas été effectué.
Monsieur le président, à l’orée de cette nouvelle législature, je souhaiterai, en tant que députe, avoir l’assurance que de tels manquements graves à la gestion publique ont été correctement traités et ne se reproduiront pas.
Aussi, vous plaira-t-il de répondre aux questions suivantes:
- Quel est le montant exact du passif fiscal dont la nouvelle législature pourrait hériter de celle écoulée et dont vous étiez le Président ;
- Quel traitement avez vous consacré à son apurement ;
- Les responsabilités de ces manquements ont-elles été situées et, le cas échéant, quelles sanctions avez vous diligentées?
- Quelles précautions avez-vous prises pour que ce honteux épisode dit de “l’impôt des députés” ne se reproduise sous la 13ème législature?
Puisque l’heure est à la mise en place de commissions ad-hoc, notamment pour combattre l’absentéisme parlementaire, monsieur le Président, j’estime que cette affaire, plus que toute autre, mérite d’être prise en charge par une commission ad hoc car l’institution parlementaire doit être l’exemple achevé de civisme fiscal.
Me réservant le droit de saisir le gouvernement d’une question écrite pour ma propre gouverne et pour éclairer la lanterne de mes mandants (les citoyens sénégalais) sur cette question qui les intéresse au plus haut point vues les passions qu’elle avait déchaînées, je vous souhaite bonne réception de la présente et vous prie, Monsieur le Président, d’agréer l’expression de mon respect.