L’accord de pêche entre le gouvernement et l’UE est en quelque sorte une prorogation du précédent avec des amendements portant notamment sur le tonnage et le montant. Le tonnage autorisé porte en effet sur de 10.000 tonnes de thon par an (50.000 tonnes sur les cinq ans) et 1750 tonnes de merlu par an (8750 tonnes sur les cinq ans). Quant à la valeur du protocole, elle estimée à 3.050.750 Euros par an, soit une valeur globale de 15.253.750 Euros (10 milliards de francs CFA) sur une durée de 5 ans. Sur le plan symbolique.
Mais les cadres du Pastef estime que cet accord de pêche, traduit un manque criard d’empathie envers les communautés et les familles des pêcheurs qui souffrent, dans leur chair et dans leur intimité, des affres de ce partenariat, en termes de dégradation continue de leurs conditions de vie, pour cause de raréfaction des ressources halieutiques qui constituent pratiquement leurs seuls moyens de subsistance. L’actualité dramatique sur l’émigration clandestine sonne à cet effet comme une piqûre de rappel, dans la mesure où les acteurs de la pêche constituent doublement une bonne partie des contingents, d’abord en tant que convoyeurs ensuite en tant que candidats à l’aventure européenne, d’après eux.
Contrairement aux dénégations des autorités sénégalaises, notamment du Ministre en charge de la pêche, il est établi que les protocoles d’Accord de pêche avec l’Ue sont, de renouvellement en renouvellement, l’une des causes directes de l’émigration clandestine qui décime notre jeunesse. Sur l’absence de communication sur l’Accord de pêche Il est à déplorer que le peuple sénégalais ne soit informé que par le plus grand des hasards, de l’existence de ce protocole d’Accord de pêche, qui est d’une extrême sensibilité au regard notamment de ses implications biologiques et socioéconomiques et du contexte dans lequel intervient sa mise en œuvre.
N’eût été la communication faite sur la question par le Parlement Européen, l’opinion publique sénégalaise resterait encore longtemps tenue dans l’ignorance quant au protocole d’Accord de pêche et ses tenants et aboutissants.
Ces cadres affirment que ce blackout volontaire sur la gestion des ressources naturelles consacre une violation de l’article 25-1 de la Constitution révisée le 20 mars 2016 qui dispose que “Les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour l’amélioration de ses conditions de vie. L’exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bienêtre de la population en général et à être écologiquement durables.”
Cette absence de transparence dans la gestion du secteur de la pêche et le défaut de fiabilité des statistiques sont symptomatiques de l’état de déliquescence actuel du secteur de la pêche dans notre pays. Sur le fond du protocole d’Accord Plusieurs manquements préjudiciables à la sauvegarde des intérêts du peuple sénégalais sont à dénoncer de manière énergique:
Un bradage à vils prix de nos ressources halieutiques. Si l’on fait abstraction des 8750 tonnes de merlu noir qui seront pêchées sur la durée du protocole pour ne considérer que les 50.000 tonnes de thon, la tonne de thon aura été cédée à 305 euros soit 200.000 F CFA environ, ce qui revient à 200 F CFA le kilogramme de Thon, au moment où le Kg de thon rouge importé dans le marché français se vend au prix minimal de 10800 fr CFA (16,5 euros/kg selon le Réseau des Nouvelles des Marchés de France AgriMer).
Une aggravation du processus de dégradation des pêcheries et des habitats Par-delà les considérations financières et le choc psychologique qu’elle opère chez les acteurs de la pêche en termes de démoralisation, l’intervention des navires européens par le biais des protocoles d’accord de pêche, a tendance à aggraver le processus de dégradation des pêcheries et des habitats quelle que soit par ailleurs l’espèce ciblée, ne serait-ce du fait de l’importance des captures accessoires d’espèces sensibles qui sont difficiles à maitriser quoi qu’en disent les protagonistes.
De façon générale, ces protocoles d’Accord avec l’Union Européenne, nous renvoient à notre propre échec, notre absence de vision et notre incapacité à se donner les moyens pour exploiter par nous-mêmes nos propres ressources halieutiques et pour créer de la valeur ajoutée au niveau national à travers leur transformation industrielle.
3-Un accord en total déphasage avec les meilleures pratiques dans le secteur 3 Le principe directeur de la signature d’un accord de pêche doit être basé au moins sur deux points que sont l’état des ressources halieutiques concernées par l’accord et la capacité de la flotte nationale à exploiter cette ressource. Un accord de pêche doit être signé sur la base du surplus de production qui correspond au potentiel halieutique d’un stock que la flottille nationale n’est pas en mesure de pêcher.
On apprend dans le nouveau protocole que l’accord est basé sur les meilleurs avis scientifiques disponibles et une consultation des parties prenantes. Ceci n’est pas le cas car le Centre de recherche océanographique (CRODT/ISRA) n’a pas directement accès aux données de débarquement de merlu pour une évaluation correcte et la mortalité par pêche estimée était excessive, et dépassait la mortalité correspondant à une exploitation durable selon le dernier rapport du COPACE (Comité des Pêches pour l’Atlantique Centre-Est de la FAO). Pourtant les évaluations des stocks de merlu par le COPACE montrent qu’ils sont pleinement exploités. Les recommandations de la recherche scientifique sont en totale contradiction avec la décision du Sénégal de signer de renouveler ces accords avec l’UE.
4- Des sanctions non dissuasives sur le dépassement quantitatif Si la capture des espèces hautement migratoires dépasse le tonnage de référence annuel autorisé Dans ce cas, le Sénégal se verra attribuer 29.559 FCFA pour chaque tonne supplémentaire capturée. Autrement dit, si ces navires faisaient 50 000 tonnes de captures supplémentaires, ils ne verseraient que 1.477.946.212 FCFA, soit 14.75% du montant initial signé pour cet accord de pêche. Si la capture des espèces démersales profondes dépasse le tonnage de référence annuel autorisé Dans ce cas, le Sénégal se verra attribuer 62 402 FCFA pour chaque tonne supplémentaire capturée. Autrement dit, si ces navires faisaient 50 000 tonnes de captures supplémentaires, ils ne verseraient que 3.120.100.000 FCFA, soit 31.13% du montant initial signé pour cet accord de pêche. Voilà ce que symbolisent réellement ces protocoles accords de pêche avec l’Union Européenne: l’échec de nos gouvernants, leur manque de vision et leur incapacité. Nos Solutions pour un développement du secteur de la pêche:
❖ La mise en place d’un système d’information national sur pêche pour une publication systématique de toutes les informations relatives au secteur de la pêche et la réforme du système des statistiques des pêches (amélioration du système de collecte, de traitement et de production des statistiques de la pêche).
❖ L’Etat doit réserver la zone des 12 milles marins (mer territoriale) à l’exercice exclusif de la pêche artisanale pour donner un accès prioritaire à la ressource et aux marchés aux activités de pêche socialement équitables et écologiquement durables ;
❖ Dans l’avenir, l’État du Sénégal devrait opter pour une politique qui tendrait à développer sa propre flotte pour exploiter et transformer dans le pays les stocks de thons. Cette stratégie contribuera à l’optimisation de la valeur ajoutée et la création d’emplois pour atténuer les risques d’émigration clandestine.
❖ Il faudra veiller à l’application sans concession de la réglementation sur la pêche maritime (repos biologique, permis de pêche, immatriculation des pirogues, filets à mailles réglementaires) ;
❖ Afin que la pêche puisse financer la pêche, l’Etat doit allouer au secteur ses ressources propres : une part importante de l’argent tiré de l’accord doit être réinvesti dans le secteur de la pêche de même que celui des licences de pêche, permis de pêche, cartes mareyeur, amendes, etc.)