Par Dr EL HADJI IBRAHIMA MBOW, Président de l’UNION CITOYENNE BUNT BI
La découverte de richesses pétrolières et gazières nous fait entrer dans la cour des pays pétroliers et gaziers donc en proie à toutes les convoitises, à toutes les demandes et à tous les dangers. Le Sénégal, pays traditionnellement agricole va connaître un nouveau statut à partir de 2021 inschaALLAH, celui de pays pétrolier et gazier exigeant une mutation profonde de comportements aux plans individuel, collectif et étatique.
Les débats actuels divers et variés montrent que le secteur du pétrole et du gaz suscite nombre de questions légitimes, nombre d’attentes et d’exigences mais aussi beaucoup de fantasmes. C’est un secteur à la fois complexe et crisogène mais qui offre des potentialités appréciables pour notre économie en quête de développement.
Le Sénégal est un pays démocratique. Les débats sont nourris et majorité, opposition comme société dite civile, avancent leurs arguments. Quelle vitalité démocratique enviable !
Sur le plan de la citoyenneté, ce débat sur le pétrole et le gaz, nécessaire et enrichissant à tous points de vue est souhaitable avant que le premier baril ne soit extrait des fonds sous-marins. Nous devons donc débattre en toute responsabilité et sans tabous pour apporter les éclairages nécessaires.
De même, sur le plan judiciaire, toute la lumière doit être faite sur l’ensemble des transactions et contrats initiés ou conclus depuis bien avant 2012 jusqu’à maintenant pour lever toute équivoque, éclairer l’opinion et enfin rendre justice au nom du peuple. Tous les acteurs concernés et ou impliqués doivent être entendus sans exclusive pour faciliter la manifestation de la vérité sur les supposées malversations et éventuels crimes ou délits concernant nos ressources naturelles. Le lourd passif hérité de la gouvernance d’avant 2012 n’a certainement pas encore livré tous ses secrets.
« L’exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population en général et à être écologiquement durables » (article 25-1 de la Constitution révisée en mars 2016). La Constitution garantit ainsi l’exigence de transparence incombant aux pouvoirs publics dans l’exploitation des ressources naturelles.
Aussi, des articles du Code Pétrolier rendent-ils obligatoire la publication au Journal Officiel de la République du Sénégal des conventions et contrats signés par la société d’Etat PETROSEN et le ou les demandeurs, puis contresignés par le Ministre chargé du pétrole, après avis du Ministre chargé des Finances et approuvés par le Président de la République.
De plus, l’article 4.6 du Code de Transparence dans la Gestion des Finances publiques stipule « les contrats entre l’administration publique et les entreprises, publiques ou privées, notamment les entreprises d’exploitation de ressources naturelles et les entreprises exploitant des concessions de service public, sont clairs et rendus publics. Ces principes valent tant pour la procédure d’attribution du contrat que pour son contenu ».
En effet, l’exploitation des ressources naturelles non renouvelables de matière organique fossile comme le gaz et le pétrole est complexe et nécessite une expertise et une expérience à consolider pour le Sénégal. Elle nécessite d’une part, une bonne maîtrise des technologies et une main-d’œuvre hautement qualifiée que notre pays doit acquérir, et d’autre part, une mobilisation exceptionnelle de capitaux et des investissements financiers colossaux et notre pays ne dispose pas de ressources propres d’autofinancement.
Egalement, les risques d’accaparement de nos ressources par des multinationales expérimentées qui, dans un contexte de compétition féroce et de fluctuation des cours, entretiennent la spéculation et le contrôle de la distribution des hydrocarbures et de leurs produits dérivés, car les ressources pétrolières et gazières constituent un enjeu géostratégique d’envergure mondiale pouvant susciter des conflits et des guerres.
De nombreux défis sont donc à relever en ce qui concerne notre pays:
– apprendre des expériences positives comme négatives des autres pays pétroliers et gaziers,
– former et mobiliser au Sénégal et dans la diaspora des ressources humaines hautement qualifiées pour gérer lesdites ressources,
– nouer un partenariat stratégique diversifié et de qualité,
– parvenir à conserver le contrôle de ces ressources naturelles, pour le développement inclusif de la nation et le bénéfice exclusif des générations actuelles et futures,
-développer une politique extérieure équilibrée adaptée aux enjeux mondiaux, continentaux, régionaux et sous régionaux,
– développer une politique intérieure participative, inclusive et sécurisée fondée sur une unité nationale forte,
– forger une culture de citoyens imbus de valeurs positives de pays pétrolier et gazier vertueux adaptée au nouveau statut auquel accède désormais le Sénégal.
Certaines recommandations nous semblent pertinentes pour entreprendre une gouvernance efficace et paisible des ressources gazières et pétrolières :
-asseoir la place du contrôle citoyen par l’implication et l’intégration de représentants de la société civile et de l’opposition présente à l’Assemblée Nationale à toutes les étapes des processus et principales instances de décision ;
-déterminer les nécessaires engagements et obligations des compagnies pétrolières et gazières en matière de ‘local content’ pour que toutes les communautés et toutes les catégories de populations et acteurs socioprofessionnels puissent bénéficier des effets induits par l’exploitation des ressources pétrolières et gazières ;
En ce qui concerne l’utilisation et la répartition des ressources générées par le pétrole et le gaz, il est impératif d’élaborer une loi issue d’un consensus fort, fixant les modalités de perception et d’utilisation des revenus qui définira clairement les mécanismes de collecte, d’affectation, de répartition et de publication de l’ensemble des revenus générés par le pétrole et le gaz en respectant trois rubriques de dépenses : une quote-part affectée aux dépenses budgétaires de l’Etat ; une quote-part affectée aux dépenses budgétaires des Collectivités territoriales ; une quote-part affectée au fonds souverain pour les générations futures. La loi précisera les modalités de détermination de chaque part qui pourraient soit être fixées de manière permanente par la loi elle-même (avec possibilité de révision périodique), soit être fixées chaque année en fonction des montants recouvrés et des priorités et déterminer également les dépenses éligibles au financement de chaque quote-part.
En ce qui concerne, l’amélioration de la transparence et de la gouvernance du secteur à proprement parler, un organe de régulation dénommé par exemple la Haute Autorité de régulation des hydrocarbures, cadre unique de régulation, de coordination et du secteur des hydrocarbures et un organe autonome et indépendant de supervision dénommé par exemple la Commission nationale autonome de supervision des hydrocarbures, chargée de la supervision de toutes les opérations liées aux hydrocarbures et composée par des représentants de l’Assemblée Nationale, du Haut Conseil des Collectivités territoriales, du Conseil économique, social et environnemental, des Cours et Tribunaux et de la Société civile. Cet organe servira d’instance de reddition populaire des comptes et activités liées à l’exploitation des hydrocarbures par tous les acteurs, institutionnels comme privés.
Pour dire qu’à présent, notre pays est outillé pour poursuivre en toute sérénité le dialogue sur les ressources naturelles initié depuis 2018 par Monsieur Macky SALL, Président de la République afin d’entreprendre et réussir un Sénégal pétrolier et gazier, un Sénégal paisible, prospère et solidaire profitable à toutes et à tous en toute responsabilité. C’est cela le Sénégal ENTREPRENANT que nous citoyens nous appelons de tous nos vœux.
ALLAH SWT préserve le Sénégal ! Amine