À la demande du bienveillant Lieutenant de Police Mbaye Sady Diop, que j’appelle respectueusement Tonton, comme j’appelle tous les policiers qui ont travaillé ou connu feu mon papa, je dois donc dire quelques mots à l’endroit de feu le Commissaire de Police Divisionnaire Kémo Sané. Certains diront que je vis dans le passé et qu’il faut vivre avec le souvenir de mon papa, d’autres trouveront cela bien. Quand le Lieutenant Diop m’a demandé de faire ce papier, je n’ai pas voulu. Mais comme un neveu ne doit rien refuser à son oncle, j’ai donc accepté d’écrire ces mots, qui ne suffiront certainement pas pour parler de ce papa-policier.
I Un « boy Mbour »
Papa est né à Mbour, il y passera toute son enfance avec ses frères et sœurs qu’il portera dans son cœur jusqu’à la fin de ses jours. Ousmane, sais-tu que ton papa était un bana-bana au marché de Mbour ? Me lança, d’un air moqueur, un grand cousin. En effet, papa assistait régulièrement, à ses heures perdues feue sa maman, une brave dame qui tenait un petit commerce au marché de Mbour. Il fut toujours travailleur, généreux et avenant, situation qui le poussera sans nul doute à s’engager dans l’armée. Il effectuera ses classes au génie militaire, où il rencontrera celui qui deviendra son meilleur ami, Madické Sarr.
II Policier dans l’âme
Après son service militaire, papa intègrera la police nationale comme inspecteur de police et c’est le début d’une vie professionnelle qui deviendra un sacerdoce. Il gravira tous les échelons jusqu’au grade de commissaire de police. Il aimera la police jusqu’à son dernier souffle. Amour, qu’il transmettra à son regretté frère, Nadjirou Sané et ses neveux Sécka, Sidy, Soumah et Tété qui intègreront tous la police. Je me rappelle ce gouverneur de région avec qui il sera en conflit, pour avoir crié sur son motard. Il lui fit comprendre fermement mais avec courtoisie, qu’il n’entendait pas accepter de telles pratiques et qu’à défaut d’excuses, le policier ne sera plus à ses services.
Je me rappelle des moments tristes, vécus avec son ami devenu son patron et qui lui rendra la vie difficile mais il refusait toute critique car disait-il : c’est mon patron, personne ne le dénigrera en ma présence. Je me rappelle ses collègues qu’il calmait au téléphone car ils voulaient tous en découdre avec leur patron (ils se reconnaitront tous dans ces lignes). Je me rappelle plus jeune, de ce jour où il me convoqua dans son bureau, avec son chauffeur et quelques collaborateurs pour me remonter les bretelles dans son franc-parler élégant : « jeune homme, tu n’es pas policier et si tu souhaites faire tes courses, débrouilles toi, mais ne montes plus dans un véhicule de police », avant de demander à ses collaborateurs de veiller au respect de ses instructions. Je venais ainsi d’avoir interdiction de me faire transporter. Papa aimait son métier mais détestait l’injustice d’où qu’elle pouvait provenir. Je me rappelle des jeunes étudiants qu’il aimait tant, devenus tous des cadres (Magistrats, commissaires de Police, Professeurs des universités, Avocats…) mais continuait de les traiter comme des enfants en leur offrant des habits et autres pendant les fêtes religieuses. Un vrai papa poule !
III. Un policier, un universitaire, une vie
Papa aimait les études, il ne s’en cachait pas. Nos moments ont toujours été très tendus puisqu’il voulait toujours me hisser au plus haut niveau. La preuve, il reprit ses études bien plus tard et enseignait le droit avec passion. Tu as laissé derrière toi tant de personnes qui t’aiment, tes enfants, tes collègues, ton entourage, et ta famille.
On se souviendra de toi comme un père généreux apprécié de tous.
On savait que quoi qu’il arrive on pouvait compter sur toi.
Ta gentillesse, ta compréhension, ton talent, et surtout le manager que tu étais, nous manque.
Un souvenir ne meurt jamais, il s’endort simplement.
Tu es et tu resteras gravé dans nos mémoires.
Repose en paix NIANTHIO !
Paris, le 01/04/2023
Ton fils
Docteur Ousmane SANE