L’ouverture de China Mall à Dakar pourrait s’expliquer par attractivité de l’économie sénégalaise. «Une grande enseigne ne s’installe pas quelque part par hasard, mais souvent suite à une étude de marché. Et s’il y a des parts de marché intéressantes et des perspectives de croissance, cela motive les concernés à prendre la décision d’aller à la conquête du marché sénégalais», indique l’économiste Mor Gassama.
Son collègue Souleymane Keita affirme cela peut-être une aubaine pour les Sénégalais. «Il y a une autre offre qui vient s’ajouter à celle qui existe déjà. Et cette diversification de l’offre est une bonne chose pour les consommateurs parce que ça leur permet d’avoir une baisse des coûts des produits», indique-t-il. Et de préciser : «Une nouvelle entreprise qui fait une nouvelle offre a intérêt à agir sur le niveau des prix pour gagner le marché. Et cela va occasionner un effet de contagion. Si les chinois baissent leurs prix, ils vont pousser Auchan à faire la même chose pour conserver sa clientèle».
Selon lui, cet effet de contagion global, conduira vers une tendance baissière des prix dans les supermarchés au grand bonheur des consommateurs. Mor Gassama ne dit pas le contraire. L’enseignant-chercheur à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar affirme que la concurrence est une structure de marché qui assure aux consommateurs le meilleur rapport qualité-prix. Selon lui, l’arrivée de China Mall va casser la position dominante d’Auchan sur le marché. «Les Chinois excellent dans le low cost, leur arrivée pourrait être bénéfique pour les consommateurs, car les supermarchés français seront obligés de fournir un peu plus d’efforts pour s’aligner sinon ils vont perdre des parts de marché», souligne Mor Gassama.
Souleymane Keita déclare qu’il y a une différence entre China Mall et les supermarchés français. Le premier, indique-t-il, est une entreprise chinoise qui cherche à s’implanter. Elle va chercher un mode opératoire qui lui permettra de conquérir le marché. «Les Chinois quand ils s’installent sous un segment de marché, ils appliquent ce qu’on appelle le dumping (vente à perte), ils vendent leurs produits à un prix inférieur au prix de revient juste pour fidéliser leur clientèle. Cette baisse de prix leur permettra de recueillir le maximum de clients. C’est une stratégie», explique-t-il.
Souleymane Keita invite par ailleurs l’Etat à veiller à la qualité des produits qui sont proposés sur le marché. «Si l’autorité régulatrice joue convenablement son rôle, l’impact ne sera que bénéfique pour les populations», dit-il. Il indique que l’Etat a deux possibilités : soit il agit sur la stratégie que la nouvelle entreprise va adopter en lui fixant une marge à ne pas dépasser pour permettre aux autres, notamment Auchan, de continuer de bénéficier du niveau de revenu qu’il a toujours réalisé et maintenir son chiffre d’affaires, soit il laisse la nouvelle entreprise dérouler sa stratégie de baisse qui va pousser à Auchan de faire de même et perdre une part importante de marché. Pour lui, la deuxième option est la meilleure façon de soutenir le pouvoir d’achat des ménages, sauf qu’une perte de chiffre d’affaires d’Auchan serait synonyme d’une perte pour l’Etat en termes d’impôts.
