La parole citoyenne ou politique doit rester libre mais mesurée

Contribution

Par Moussa Bèye

J’ai lu et écouté Abdoul Mbaye, Président de l’ACT, dont le parti est membre du CRD, de la Grande Coalition Wallu et de l’entente Yewwi-Wallu. A propos de cette entente mise en place, et seul moyen d’imposer à Macky Sall une cohabitation dans le cadre du système de scrutin majoritaire à un tour (« raw gaddu »), ses camarades au sein du CRD puis de Wallu puis de l’entente Yewwi-Wallu pourraient témoigner du rôle qui fut sien pour l’avancée de l’idée et sa mise en œuvre. Cela en ayant retenu de ne figurer sur aucune des listes, cela pour ceux qui cherchent à insinuer le doute sur le camp auquel il appartiendrait.

S’exprimant sur la RFM le 8 juillet 2022, il a appelé au discours apaisant ; Il a réclamé des politiques qu’ils cessent d’évoquer des questions ethniques, raciales ou régionalistes.

Moustapha Sarre, dans un article paru le 9 juillet 2022, lui a dénié le droit à la parole puisque « « pseudo opposant » « ne représentant pas 1% de l’électorat ».

Voilà comment commence les dictatures : on trouve les raisons de faire taire ceux qui prennent la liberté de s’exprimer lorsqu’ils ne sont pas d’accord avec la « ligne », ou appellent à la retenue pour tout propos susceptible d’attiser la haine entre concitoyens et de mettre en cause le ciment de la nation. Remarquons d’ailleurs que la même rengaine fut celle de l’APR avant de se lire sous de nouvelles plumes de l’opposition…

J’ai écouté Abdoul Mbaye, mais à l’inverse de Moustapha Sarre, j’avais pourtant essentiellement apprécié sa grande retenue et tout ce qu’il avait su justement taire au nom de l’unité de l’opposition à préserver, préjugeant sans doute de comportements devenus habituels comme ceux de M. Sarre.

A l’inverse de Moustapha Sarre et de quelques autres, Abdoul Mbaye ne parle d’ailleurs jamais d’« opposition véritable » ou de « pseudo opposition », inventions linguistiques d’une partie de l’opposition sénégalaise qui travaille d’abord à sa destruction par l’éclatement de son unité.

Abdoul Mbaye a également tu que l’éthique politique ne devrait pas nous permettre de mettre en scène, avec micros et cameras, une présentation de condoléances rendues plus de dix jours après un décès.

Abdoul Mbaye a tu que trop souvent, la mairie de Ziguinchor, la région de Ziguinchor n’est pas citée par le leader de Moustapha Sarre alors qu’elle devrait l’être plutôt que la Casamance. Lisez Sarre et vous noterez que lui-même écrit « s’adressant aux Casamançais ». Mais pourquoi donc aux Casamançais et non aux Ziguinchorois (ville ou région) ??? Pourquoi donc aux seuls Casamançais et non au Peuple du Sénégal ???

Abdoul Mbaye a tu que dans le contexte particulier du sud de notre pays, verser dans le régionalisme est encore plus chargé de suspicions que d’évoquer des noms à « consonance diola » qui donneraient lieu à stigmatisation de la part du régime de Macky Sall.

Abdoul Mbaye a tu que si à chaque fois que Macky Sall, spécialiste de la méchanceté politique et dictateur en herbe, transformait un leader de l’opposition en victime, cela devait être interprété comme la haine d’une ethnie ou d’une région de notre pays, notre Nation éclaterait bien rapidement. Ce serait aussi le meilleur moyen d’accélérer le chaos qui reste à notre sens un des projets possibles de l’actuel occupant du Palais de l’avenue L S Senghor afin de faciliter son maintien comme son départ.

Abdoul Mbaye a dénoncé en termes bien plus virulents les propos de Doumbourou Sow et de Gaston Mbengue, ce dernier ayant eu l’intelligence et la clairvoyance de l’excuse.

Encore une fois, nous sommes sur ces questions de principes, sur les fondamentaux du socle de notre état, de notre république ou de ce qu’il en reste. Et rien ni personne n’empêchera Abdoul Mbaye de se prononcer, chaque fois que de besoin.

Sachons donc raison garder! L’adversaire est Macky Sall. Il n’est pas au sein de l’opposition. Et de grâce apprenons à tolérer le conseil et même la parole contraire. Mais surtout de quelque bord que l’on soit, majorité comme opposition, évitons les propos intentionnels ou non, susceptibles de remettre en cause l’unité nationale dans la durée.

Nous ne remplacerons pas une dictature par une autre dictature. La démocratie est dans la liberté de la parole et de l’écrit dans la précaution de leur juste mesure, garantie au citoyen le plus isolé qui soit, y compris celui sans électorat significatif…

Conseiller à la prospective et à la stratégie politique du pdt de l’ACT

New-York le 10 juillet 2022

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