Lors des élections locales de 1996 le vote s’était déroulé en deux jours. Cette fois, avec 47 listes, ce scénario risque de se répéter.
Walf Quotidien : Certains proposent une révision du code électoral pour permettre à un électeur de ne prendre que 3 à 5 bulletins.
Moustapha Diakhaté : «Evidemment pour cette fois-ci on ne peut pas changer la donne. Ce qu’il faut faire pour que les gens ne perdent pas trop de temps dans les bureaux de vote : certains ont proposé une révision du code électoral notamment en son article 78 pour permettre à un électeur de ne prendre que 3 à 5 bulletins de vote. Mais, même pour choisir cinq bulletins, c’est encore difficile. Il est plus facile même de ramasser 47 bulletins que de choisir 5 sur 47. Donc, ce n’est pas en réalité la bonne solution. Il faut augmenter le nombre d’isoloirs, installer au minimum cinq isoloirs dans chaque bureau de vote. Ainsi, cinq personnes pourront voter en même temps. C’est la seule solution parce que avec 47 listes, s’il y a 300 électeurs dans un bureau de vote, il faudra 16 heures pour que tous votent et qu’il n’y ait pas une minute de perdu entre deux électeurs et c’est impossible. Donc, la seule solution sans pour autant toucher à la loi, c’est d’augmenter le nombre d’isoloirs. D’autres proposent même que le scrutin se déroule sur deux jours. C’est possible parce qu’on a connu ça en 1996. Le gouvernement peut discuter avec la classe politique pour voir si on peut voter le samedi et le dimanche ou le dimanche et le lundi pour permettre à tous de voter. C’est pour dire qu’on a été proche du ridicule. C’est pourquoi, il faut une solution à l’avenir.
Quelles sont vos solutions ?
Je préconise la suppression des listes nationales et l’installation de 150 circonscriptions électorales sur l’ensemble du territoire et quinze au niveau de la diaspora. De ce fait, ceux qui vivent dans ces circonscriptions vont savoir pour qui ils votent. Parce qu’en réalité, cette possibilité de passer par la liste nationale fait que les gens présentent des candidatures. Mais, s’ils étaient sûrs que c’est seulement sur la majoritaire qu’il faut passer pour avoir des députés, ils ne présenteraient pas de liste.
Deuxième chose un filtre citoyen, c’est-à-dire exiger de chaque liste, pour être valide, d’être parrainée par un nombre consistant de citoyens, disons 2% de l’électorat de la circonscription. En plus, ces listes doivent être présentes sur au minimum 3/5 des départements. Enfin la caution doit être au minimum égale au 3/5 des frais qu’occasionne la participation des listes aux législatives. Voilà un certain nombre de pistes sur lesquelles nous devons travailler pour empêcher à l’avenir ce record historique. Non seulement cela va coûter cher au contribuable, les gens vont passer beaucoup de temps devant les bureaux de vote et il y aura de la confusion sur les bulletins de vote. Notre pays ne le mérite pas.
Justement, ne craignez-vous pas le chaos le jour du scrutin?
C’est fort probable. Non seulement, il y aura le chaos mais le chaos peut même survenir avant le scrutin. Est-ce que le Sénégal dispose d’imprimerie capable d’imprimer d’ici les élections environ 365 millions de bulletins de vote, des millions d’enveloppes imprimées, etc. ? J’en doute, c’est pourquoi je demande à tout un chacun d’être plus vigilant parce que, par rapport à notre parcours démocratique, nous n’avons pas le droit de nous tromper sur un certain nombre de mesures à prendre. Déjà, en 1996, on avait rencontré ce type de difficulté et cela avait été l’occasion de revoir le code électoral, le dispositif d’accompagnement du processus électoral et depuis lors ça se passe bien. Nous de l’Apr et de Benno, nous ne pouvons pas nous permettre de laisser le pays subir un fiasco électoral du fait de l’indiscipline et de l’anarchie que des gens ont voulu installer dans le pays.
Mais, certains de l’opposition accusent le pouvoir d’avoir favorisé les nombreuses listes pour mieux diviser l’opposition.
Ce sont des farfelus. Ils accusent et inventent parce qu’ils n’ont pas de programme. Quand vous comparez leur programme aux prérogatives de l’Assemblée nationale, vous avez même honte. Apparemment, ils n’ont jamais lu le règlement intérieur et la Constitution du Sénégal. Il y a des choses qu’un député ne peut pas faire. Dire que je vais les faire, c’est se moquer des citoyens. Le programme présidentiel n’est pas celui d’un candidat aux législatives. En plus, quel intérêt avons-nous à payer des listes ? D’abord, ça coûte cher, ensuite ça ne nous rapporte rien parce que ces gens ne votent pas pour nous.
Vous ne figurez pas sur les listes. Pourquoi ?
Je ne suis pas sur les listes parce que ne je suis pas candidat. Je n’ai pas voulu revenir à l’Assemblée nationale et ça je l’ai dit depuis très longtemps. C’est une décision personnelle et j’avais fait la demande au président de la République qui l’a acceptée. Avant cela, j’ai fait une déclaration publique pour créer toutes les conditions pour ne plus revenir à l’Assemblée nationale. Je n’ai pas été zappé comme le croient certains. C’est une décision personnelle et ça participe de ma conception des fonctions nominatives ou électives. Parce que ce n’est pas bon de s’habituer au pouvoir, c’est pourquoi je considère qu’autant on a limité les mandats du président de la République à deux, autant il faut qu’on aille vers la limitation du nombre de mandats pour les députés, les maires et les présidents des conseils départementaux. Il est inacceptable que des gens passent plus de 40 ans à exercer des fonctions nominatives ou électives. Il faut que les gens apprennent à partir pour permettre à la démocratie de se régénérer avec des nouveaux visages et des nouvelles pratiques parlementaires ou gouvernementales. Mais, cela ne veut pas dire que je vais tourner le dos à ma carrière politique. Mon accompagnement avec le Président Macky Sall ira jusqu’au bout.
On vous a promis un poste de ministre ?
Jamais de la vie. On ne m’a rien promis. Quand il (Macky Sall, Ndlr) me désignait tête de liste de Dakar, il ne m’a pas demandé mon autorisation. Aujourd’hui, il ne m’a rien demandé, n’a pas à me promettre et je ne lui ai rien demandé.
Que répondez-vous aux accusations du député El Hadj Diouf qui dit que vous aviez une enveloppe supplémentaire de 5 millions ?
Je ne boxe pas dans la même catégorie que lui. C’est pourquoi, je ne polémiquerai jamais avec lui : ni en public ni en privé.
Walf Quotidien
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