Ce n’est pas demain que ces taux jugés usuriers par certains vont diminuer. En effet, Oumar Cissé, le directeur de la micro finance au ministère de la Micro finance et de l’économie sociale et solidaire, reconnaît que ces taux d’intérêts appliqués sont une problématique du secteur, mais selon lui, ils sont légaux parce qu’ils sont encadrés. «Ils datent d’une loi de 2008 édictée par l’Uemoa», dit-il.
«Pourquoi ces taux sont chers ? C’est parce que les institutions de micro finance ont ce qu’on appelle les coûts opérationnels: ils ont des agents de crédit, ils ont des caissières, ils font le suivi des crédits et font des recouvrements. Il y a aussi ce qu’on appelle les coûts du risque, le risque qu’elles prennent en faisant du crédit à une femme par exemple qui n’a pas de garanti. Ce risque-là, il faut le rémunérer», explique Oumar Cissé.
Qui s’empresse d’ajouter : «Et enfin, les institutions de micro finance ont ce qu’on appelle la ressource qui est essentiellement l’argent, mobilisée pour faire du crédit. Et cette ressource-là, vient du secteur bancaire, parce que les sociétés de micro finance n’ont pas accès directement à la Beceao. Cela fait même partie des revendications des directeurs généraux des institutions de micro finance qui souhaitent, comme toutes les banques, pouvoir lever directement de l’argent à la Banque centrale. Ce que la loi leur interdit pour le moment».
Cependant, le directeur de la micro finance précise que c’est au Sénégal que nous avons les taux d’intérêt les moins chers de l’espace monétaire. «Cela, les gens ne le disent pas. Mais si vous allez au Mali ou au Burkina, les taux sont plus élevés », poursuit. Non sans mettre en exergue les efforts de l’Etat pour faire en sorte que les taux d’intérêt soient soutenables.
Oumar Cissé révèle en effet que l’Etat a fait des efforts en défiscalisant tout ce qui est Tva et consorts. En outre, il soutient que l’Etat travaille avec les acteurs de la micro finance, le ministère de l’Economie et des Finances, la Bceao et avec l’Uemoa, parce que c’est une politique communautaire. «Le Sénégal seul ne peut pas décider de diminuer les taux d’intérêt au niveau national», fait remarquer Oumar Cissé qui s’exprimait, hier, lors d’une conférence publique à l’IPG sur le thème: Micro finance, levier de l’auto entreprenariat des jeunes diplômés. Un débat qui entre dans le cadre de la semaine de la micro finance est organisé par Jokkolabs et dont le parrain est Ameth Amar,le défunt patron de la société Nma Sanders.
Pour réduire ces taux que certains considèrent comme usuriers, l’Etat s’appuie également sur des mécanismes comme la Direction à l’entreprenariat rapide (Der) qui prête aux porteurs de projets à un taux d’intérêt de 5%. Mais, selon lui, c’est parce que c’est une ressource publique qui passe par les institutions de micro finance. Et c’est pourquoi la Der et les institutions financent à des taux bas. «Nous avons même des fonds venant de la coopération italienne qui nous permettent de financiers à 6,5% parce que sont des ressources affectées. Mais quand les institutions doivent prendre leurs ressources propres ou emprunter dans des banques, forcément les taux d’intérêt sont beaucoup plus chers », explique encore le directeur de la Micro finance.
Présidant la deuxième édition du Salon africain de l’économie sociale et solidaire, Macky Sall s’était insurgé contre les institutions de micro crédit qu’il accusait de faire de l’usure avec des taux d’intérêt élevés. «Nous constatons tous que les taux d’intérêt sont trop élevés. Il est impératif de les revoir à la baisse pour les bénéficiaires de la micro-finance. Des taux 12 ou 13% ou 14% ce sont des taux d’usure. Il faut dire les choses par leurs noms», avait fulminé le Chef de l’Etat.