Une agence de notation financière africaine, pourquoi faire ?

Eco-Finance

Une agence de notation africaine est-elle pertinente ? L’économiste Mor Gassama rappelle que l’Europe a son Fitche. C’est pourquoi, selon lui, il ne serait pas un crime pour l’Afrique d’en disposer. Mais, il s’empresse d’ajouter : «pourvu que la rigueur et le sérieux soient au rendez-vous». 

«En principe, on devrait s’aligner sur les normes standard. Et si vous avez fait le constat, souvent les notes des différentes agences de notation ne sont pas aussi lointaines généralement. Parce que ces agences travaillent selon certaines normes. Il n y a pas de critères exclusivement réservés à l’Afrique», souligne l’enseignant à l’Ucad.

Abdoul Mbaye indique lui aussi qu’une agence africaine de notation ne serait pas une mauvaise chose. Mais, selon lui, le prêteur ou l’investisseur conservera le libre choix de la note qu’il retiendra pour évaluer son risque. Il pourra parfaitement préférer l’agence «mondiale» à l’agence africaine, dit-il, ajoutant que cela pourrait tout juste ouvrir des opportunités auprès de certains prêteurs ou investisseurs africains.

Mor Gassama soutient qu’en Afrique il faut plus de rigueur et de sérieux dans la gestion de nos affaires. C’est de loin beaucoup plus pertinent que de penser à créer notre propre agence de notation. «Ce n’est pas du tout une priorité» tranche l’économiste. Selon lui, les notations permettent d’apprécier le niveau de crédibilité et/ou de solvabilité de l’économie d’un pays donné. Plus la note est favorable, plus cela permet au pays concerné de lever des fonds sur le marché financier à un taux d’intérêt plus faible.

Le président de la République Macky Sall appelle à la création d’une agence de notation financière africaine. À ses yeux, cette solution s’impose face aux évaluations «parfois très arbitraires» des agences internationales qui «exagèrent le risque d’investissement» en Afrique, ce qui renchérit le coût du crédit. «En 2020, alors que toutes les économies subissaient les effets de la Covid-19, 18 des 32 pays africains notés par une des grandes agences d’évaluation, ont vu leur notation dégradée. Ceci représente 56% de notation dégradée pour les pays africains contre une moyenne mondiale de 31% durant la période», a-t-il dit. «Des études ont montré qu’au moins20% des critères de notation des pays africains relèvent de facteurs plutôt subjectifs, d’ordre culturel ou linguistique. Donc des facteurs sans lien avec les paramètres qui jaugent de la stabilité d’une économie», poursuit le chef de l’Etat, ajoutant que la perception du risque d’investissement en Afrique reste toujours plus élevée que le risque réel. «Nous nous retrouvons à payer plus qu’il ne faut les primes d’assurance. Ce qui renchérit le crédit à accorder à nos pays et naturellement pénalise la compétitivité de nos économies. Donc, il y a une logique qui est derrière cette réalité économique de l’Afrique», décrypte-t-il.

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