Par Babacar Gaye
Pour faire adopter sans débat et sans vote, la loi de finances de l’année avant le début de l’année budgétaire 2025, le Premier ministre Ousmane Sonko envisagerait d’utiliser les arguties de l’article 86 alinéa 6 de la Constitution libellé tel qu’il suit:
“Le Premier Ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le Premier Ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session.”
Cette disposition constitutionnelle qui est le pendant de l’article 49 alinéa 3 (le quarante neuf-trois) de la Constitution française ( voir supra), a été utilisée 112 fois en France depuis 1958 (28 fois par Michel Rocard et 23 fois par Élisabeth Born…) pour tordre le bras à une majorité divisée à propos d’une loi controversée.
Or, Pastef dispose d’une écrasante majorité qui lui est totalement acquise à l’Assemblée nationale. Pourquoi alors faire usage du 86-6? C’est inédit. Car c’est la première fois depuis l’instauration du poste de Premier Ministre en 1970, que le Gouvernement envisage de passer en force pour le vote du Budget. Certes, les délais sont courts, mais des concertations entre les groupes politiques pourraient aboutir à un consensus fort sur l’examen et l’adoption de la loi de finances avant le 31 décembre 2024.
Cependant, si comme on le subodore, le PM décide la passage en force, il sera quand-même tenu de se présenter à l’Assemblée nationale pour engager la responsabilité du Gouvernement sur la question, obligatoirement après l’examen du projet de loi de finances en Commission des Finances, ministères après ministères pour respecter les dispositions de la Loi organique relative aux lois de finances 2020-07 du 26 février 2020 et celles du règlement intérieur de l’Assemblée nationale.
En effet, aucun projet ou proposition de loi ne peut être discuté-e en plénière si il-elle n’est pas examiné-e préalablement en commission permanente. En outre, l’article 60 alinéa 2 de la LOLF dispose que “Les crédits du budget général font l’objet d’un vote par programme (ministères) et par dotations. Quid aussi du délai de 10 jours imparti pour la distribution du projet de loi et des documents annexes aux députés, avant la tenue de la séance en commission?
Un député averti en vaut deux.
Nota Bene:
Le 49-3 de la Constitution française dispose:
“Le Premier ministre peut, après délibération du Conseil des ministres, engager la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de finances ou de financement de la Sécurité sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session.”
Ancien député
Leader du Mouvement Mankoo Mucc